Cameroun - Economie. Réforme de l'investissement au Cameroun : Le crédit d'impôt, une «avantage théorique» qui inquiète les industriels

cameroun24.net Mardi le 09 Septembre 2025 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Une onde de choc traverse le monde économique camerounais. La récente ordonnance présidentielle du 18 juillet 2025, réformant en profondeur le dispositif d'incitation à l'investissement, est passée au crible par le Syndicat des industriels du Cameroun (Syndustricam).

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Dans sa dernière note d'analyse, l'organisation patronale délivre une lecture sans concession : si l'ambition est louable, les risques d'échec sont réels, au point de marginaliser les PME et de priver le texte de son impact.

La fin des exonérations, place au crédit d'impôt

Le texte signé par le Président Paul Biya enterrine la fin des exonérations fiscales de 5 à 10 ans, pierre angulaire de l'ancien régime depuis 2013. Place à un nouveau système : le crédit d'impôt. Concrètement, l'État n'exonère plus mais accorde un droit à déduction de l'impôt sur les sociétés. Les taux affichés sont volontaristes : 25% du montant investi pour un projet standard, 50% en zones prioritaires et jusqu'à 75% dans les zones enclavées.

« Sur le papier, le dispositif paraît séduisant, car l'avantage devient proportionnel à l'effort consenti », concède le Syndustricam, y voyant une logique de « justice et de transparence » plus marquée.

Un cadeau fiscal conditionné à la rentabilité immédiate

Mais le diable se niche dans les détails. L'alerte est sérieuse : cet avantage fiscal ne sera réellement utile que si l'entreprise génère des bénéfices imposables rapidement. Or, pour tout projet industriel lourd, les premières années sont souvent consacrées aux investissements et à la montée en puissance, avec une rentabilité différée.

« Beaucoup de projets industriels ne dégagent pas de profits dans les premières années », explique le Syndustricam, qui craint de voir le crédit d'impôt se transformer en « avantage théorique, impossible à imputer ». La clause de report sur cinq ans est jugée trop courte pour les projets à long retour sur investissement.

Le casse-tête du minimum de perception

Le point de friction le plus critique concerne l'articulation avec le minimum de perception (impôt minimum alternatif de 2,2% du chiffre d'affaires). Si le crédit d'impôt ne peut pas être imputé sur cet impôt plancher, il perdrait l'essentiel de sa substance, en particulier pour les PME industrielles qui en sont souvent redevables.

« Ainsi, un outil qui se voulait moteur de compétitivité risque de demeurer un avantage théorique, réservé de facto aux grandes entreprises rentables à court terme », assène l'organisation patronale.

Les entreprises existantes laissées pour compte ?

Au-delà des modalités techniques, le Syndustricam fustige le périmètre de la réforme. Celle-ci semble exclusivement tournée vers les nouveaux investisseurs, laissant sur le carreau les PMI et PME déjà existantes, pourtant vitales pour l'économie et l'emploi. L'organisation déplore également le choix de la voie de l'ordonnance, privant le texte d'un débat parlementaire public pourtant crucial pour un sujet structurant.

Alors que les autorités justifient cette réforme par la rationalisation de « cadeaux fiscaux » jugés inefficaces par le FMI, le patronat camerounais appelle à une vigilance extrême dans la mise en œuvre. Il en va de l'attractivité réelle du Cameroun et de la compétitivité de son tissu industriel.
 


Cameroon's Investment Reform: Tax Credit, a "Theoretical Advantage" That Worries Industrialists

A shockwave is rippling through the Cameroonian economic world. The recent presidential ordinance of July 18, 2025, deeply reforming the investment incentive scheme, is being scrutinized by the Syndicate of Industrialists of Cameroon (Syndustricam). In its latest analysis note, the employers' organization delivers an uncompromising assessment: while the ambition is laudable, the risks of failure are real, to the point of marginalizing SMEs and depriving the text of its impact.

The End of Exemptions, Hello Tax Credit

The text signed by President Paul Biya marks the end of the 5 to 10-year tax exemptions, the cornerstone of the old regime since 2013. Enter a new system: the tax credit. In concrete terms, the state no longer exempts but grants a right to deduct from corporate tax. The announced rates are ambitious: 25% of the amount invested for a standard project, 50% in priority zones, and up to 75% in landlocked areas.

"On paper, the system seems attractive because the benefit becomes proportional to the effort made," concedes Syndustricam, seeing a logic of "justice and transparency."

A Tax Gift Conditional on Immediate Profitability

But the devil is in the details. The warning is serious: this tax advantage will only be truly useful if the company generates taxable profits quickly. However, for any major industrial project, the first years are often devoted to investments and ramp-up, with deferred profitability.

"Many industrial projects do not generate profits in the first years," explains Syndustricam, which fears the tax credit will become a "theoretical advantage, impossible to use." The five-year carry-forward clause is deemed too short for long-term ROI projects.

The Minimum Tax Headache

The most critical point of contention concerns its interaction with the minimum flat tax (alternative minimum tax of 2.2% on turnover). If the tax credit cannot be applied to this floor tax, it would lose most of its substance, especially for industrial SMEs which are often subject to it.

"Thus, a tool intended to be an engine for competitiveness risks remaining a theoretical advantage, de facto reserved for large, profitable companies in the short term," asserts the employers' organization.

Existing Companies Left Behind?

Beyond technicalities, Syndustricam criticizes the reform's scope. It seems exclusively targeted at new investors, leaving existing SMEs and SMIs out in the cold, despite being vital for the economy and employment. The organization also laments the choice of the ordinance pathway, depriving the text of crucial public parliamentary debate for such a structuring subject.

While authorities justify this reform by rationalizing "tax gifts" deemed ineffective by the IMF, Cameroonian employers call for extreme vigilance in its implementation. The real attractiveness of Cameroon and the competitiveness of its industrial fabric are at stake.

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Didier Cebas K.

 

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